par Bernard PLOUVIER
De multiples penseurs, brillants autant qu’utopiques, ont défini l’État comme un « mal nécessaire », voué à l’administration « du Bien commun ». De Platon et son élève Aristote à Thomas Hobbes et Friedrich Hegel, en passant par les saints Augustin et Thomas d’Aquin, tous ont été d’accord – à de faibles nuances près, qui font la joie des subtils exégètes – sur les buts de l’organisation étatique et les moyens qu’il convenait d’offrir à son chef.
Quelques amusants personnages, messieurs Locke, Rousseau et Marx vinrent compliquer inutilement (variante, au gré du lecteur : génialement) le débat… mais, de nos jours, plus personne de sensé ne croit l’homme naturellement bon ni utile la dictature du prolétariat.
Quels peuvent être les critères d’un bon gouvernement de la chose publique (cette expression était rendue en langue latine par le terme « Re publica », sans que cela renvoie à un type particulier d’administration des affaires) ?
1er critère : la Loi doit être égale pour tous… soit, sans traitement de faveur ou de défaveur d’un justiciable ou d’un demandeur en raison de sa fortune, de ses origines familiale et ethnique, de sa profession, de sa religion, de son ou ses orientation(s) sexuelle(s). Pour faire simple, on peut dire que la Loi juste est indépendante de la surface sociale et des particularités de chacun. C’est ce qu’en Grèce antique on nommait l’Isonomia et qui s’applique naturellement dans le critère suivant.
2e critère : la méritocratie dans l’attribution d’un poste payé par l’argent public – le produit des impôts, des taxes, des amendes, des revenus des Domaines et régies d’État. Ce qui exige sa dévolution par concours, sans recommandation ni patronage possibles.
3e critère : la Nation, seul souverain légitime de l’État, doit être directement interrogée pour toutes les décisions capitales… si l’on préfère, un referendum doit être obligatoirement organisé pour déterminer la politique sur la peine de mort, l’immigration de masse, une déclaration de guerre, la durée légale du travail, les ressources énergétiques, les grandes lignes de la répartition des dépenses publiques… deux siècles de parlementarisme ayant démontré la totale inaptitude des élus du peuple, trop facilement transformables en représentants d’intérêts particuliers.
4e critère : si l’on estime qu’une Chambre d’élus est nécessaire à la bonne marche de l’État, il est nécessaire de les choisir parmi les travailleurs, actifs ou retraités, en excluant ceux dont l’expérience professionnelle est trop courte, voire nulle.
5e critère : chaque citoyen compte… autrement exprimé, les élus de la Nation ne peuvent être désignés que par le système de la proportionnelle intégrale, dont sont exclus à vie les grands criminels, tandis qu’une mise en observation d’au moins 10 ans est appliquée à tout immigré avant qu’on lui octroie le droit de citoyenneté, sauf service exceptionnel rendu à la communauté nationale.
6e critère : les élus doivent être modérément indemnisés, ne pas être éligibles plus de deux fois, enfin être très strictement surveillés pour éviter ou réprimer toute corruption. Car l’administration de la Chose publique ne doit pas être confisqué par un ou des groupes d’influence (lobbies en langue anglo-US, celle des terres d’élection de la corruption à visage découvert), ni par les maîtres de l’économie.
Ces critères sont-ils ou non respectés ?La réponse à cette question fait seule la différence entre le bon et le mauvais gouvernements, entre une authentique Démocratie (soit une administration du Bien commun favorable à l’intérêt de la majorité des citoyens) et une pâle imitation… tant il est vrai qu’en politique, plus qu’en n’importe quelle activité humaine, la publicité est presque toujours mensongère.
Ceci posé, les institutions ne valent que ce qu’en font les hommes.
Si une majorité de citoyens se détourne des urnes, par lassitude ou par dégoût (souvent compréhensibles), si une majorité de votants désigne pour élus des individus lâches, faibles ou souvent corrompus, alors la Nation ne peut s’en prendre qu’à elle-même. Les démagogues ne font florès que dans les nations aveulies.
Dans ce cas, une minorité active, honnête et patriote, lassée d’être l’otage permanent du crétinisme majoritaire, doit s’interroger sur la mise en application d’un droit développé en son temps par les sieurs Ambroise, le Milanais, et son élève Augustin, repris et développé par une foule de théoriciens : le Droit à l’insurrection.
Il peut arriver pour une génération, confrontée à de multiples périls menaçant gravement l’avenir de ses enfants et de ses petits-enfants, que ce droit devienne un devoir.
en couverture : tableau de Dan Witz (https://www.danwitz.com/)