par Bernard PLOUVIER
Nous créons par cet article un nouvel onglet « histoire » et avec Plouvier, notre éminent collaborateur, c’est de la vraie nouvelle histoire dont il s’agit et qui nous paraît finalement dans l’ignorance ambiante de plus en plus nécessaire. La rédaction.
L’Union des nations européennes sera impossible tant que l’on ressassera les vieilles querelles. Cette union est pourtant plus que nécessaire : elle est indispensable si les Européens veulent encore compter pour quelque chose dans un monde empesté par la multiplicité des arrogances : celle des Chinois à l’économie esclavagiste et plagiaire, celle des Mahométans et de leur Djihâd moyenâgeux, celle des USA, lorsque leurs Présidents se mettent au service des multinationales amorales ou d’un sionisme devenu dément.
La Seconde Guerre mondiale ne fut sûrement pas ce qu’en écrivent des universitaires et des auteurs mondains qui se contentent de suivre la tromperie anglo-américaine et la propagande soviétique, toutes deux parfaitement mensongères.
Pour prendre un exemple récemment cité comme emblème de la barbarie nazie, celui des victimes grecques de cette guerre absurde, il est bon de préciser des faits qui sont désormais bien connus et qui doivent servir la nécessaire réécriture de cette tranche d’histoire.
La Grèce a perdu 4,5% (soit 324 000 personnes) des 7,2 millions d’habitants qui la peuplaient avant l’attaque italienne d’octobre 1940, d’ailleurs menée contre l’avis d’Adolf Hitler.
La famine a joué un grand rôle dans cette mortalité grecque, due au blocus féroce exercé par la Royal Navy sur l’ordre de Churchill : elle a été jugée responsable de 250 000 morts en 1941-42, sur les 300 000 morts civiles induites par cette guerre (estimation de divers auteurs, étudiés par John-Louis Hondros, 1983). Ce blocus et sa mortalité, qui fut très vite signalée par la presse neutre, ont provoqué de graves remous chez les Grecs au service des forces armées britanniques en 1942. Il en est résulté un assouplissement de ce blocus à la fin de 1942 (Hondros, 1983).
Jusqu’en 1943, des cargos suédois ravitailleront gracieusement la Grèce, avec l’accord d’Hermann Goering (TMI de Nuremberg, 1947-volume 11). En 1941-42, le gouvernement turc a monnayé fort cher l’envoi de 7 000 tonnes de blé et de 10 000 T de légumes secs (Hondros, 1983).
L’Armée grecque a perdu 26 000 morts et disparus durant la campagne débutée le 28 octobre 1940, terminée par la capitulation grecque du 23 avril 41. Le Führer a interdit de bombarder Athènes – bombardée par des navires français durant la guerre précédente, en décembre 1916 sur ordre de l’amiral Louis Dartige du Fournier (van der Kiste, 1999) : puisque les Français ont la mémoire courte, il est bon de la raviver. Si Churchill bloque le ravitaillement des Grecs, il leur envoie des bombes : la RAF bombarde Athènes et Le Pirée, en plus de Rhodes et de Leros, la nuit du 2 au 3 mai 1942.
En hommage à la bravoure de l’Armée grecque, le Führer ordonne de libérer, en mai 41, les 270 000 troupiers grecs faits prisonniers, à l’exception des officiers (analyse de tout cela in Smith and al., 1953).
Les données sur la Résistance grecque et sa répression sont également bien connues, de même que l’importance des tueries entre factions grecques rivales, estimées à un peu plus de 40 000 morts (Hondros, 1983 ; Gerolymatos, 2016).
Un républicain de la mouvance vénizéliste dénommé Napoleon Zervas, né en Épire, est un soldat du rang devenu officier par piston politique et maçonnique : de l’état de sergent en 1914, il est bombardé commandant en 1917, sans avoir participé à aucun combat, de même qu’il ne se bat pas en 1940-41, alors qu’il à peine âgé de 50 ans. Il est le principal fondateur, en septembre 1941, de la Ligue républicaine (ou EDES), qui reçoit dès 1942 des membres du SOE, pour mener quelques escarmouches contre les Italiens en Épire et en Albanie (Gerolymatos, 2016). L’EDES a le soutien du gouvernement grec en exil au Caire.
Un cousin de Zervas est son principal concurrent : Athanasios Klaras-« Aris Velouchiotis ». C’est un journaliste, fils d’un riche avocat, qui joue au leader communiste et fonde en décembre 41 « l’armée de libération du peuple grec », Meligalas ou ELAS. Elle revendique « 50 000 maquisards » et en a semble-t-il 1 200, rejoints en 1944 par 1 500 ex-officiers au chômage de l’armée royale et même 6 évêques orthodoxes en dépit du communisme affiché des chefs. En 1943-44, l’ELAS est dirigé par l’ex-général Stefanos Sarafis, qui longtemps se contentera d’assassinats de soldats isolés et de coupures de la voie ferrée Athènes-Salonique, d’autant moins gênantes que les Allemands ravitaillent leurs troupes en munitions par la voie des airs (Dzelepy, 1946).
Sur l’ordre de Churchill, qui veut refaire de la Grèce une chasse gardée pour les exportations britanniques, le C in C Britannique au Moyen-Orient finance l’EAM – le Front National de Libération, l’organisme politique, créé en septembre 41, qui commandite l’ELAS -, en dépit de la colère du gouvernement en exil au Caire, présidé par l’ex-vénizéliste Emmanouil Tsouderos, qui encourage les populations de Grèce et de Crète à éviter toute guérilla par peur des représailles. À la fin de l’été 43, Churchill fait demander aux communistes de l’EAM de déclencher des « émotions populaires », des grèves et des sabotages (Dzelepy, 1946) : ce brave homme, incarnation de l’égoïsme britannique, est parfaitement indifférent aux risques encourus par les civils grecs.
Lors de la capitulation italienne de septembre 1943, l’EAM, avec les fonds britanniques, rachète des armes aux Italiens, qui estiment ainsi pouvoir se réfugier dans les campagnes et montagnes de Grèce pour échapper aux Allemands. Ils se font parfois massacrer par les Grecs (selon Eleutherios-Nikos Dzelepy, 1946, favorable aux communistes et Andreas Gerolymatos, 2016, du bord opposé). À Larissa, ce commerce d’armes se fait par entente directe entre le général Sarafis et le général italien Adolfo Infante
L’EAM avait organisé, en avril 42, une grève des petits fonctionnaires, puis une grève générale de courte durée en septembre, pour « lutter contre la famine » organisée par Churchill. Cela n’avait fait qu’aggraver le chaos économique, mais l’EAM était devenu célèbre (Dzelepy, 1946). Le 4 mars 43, une protestation contre le départ de travailleurs grecs vers le Reich tourne à l’émeute et les quelques victimes accroissent encore la bizarre « légitimité » des chefs communiste. Le bras armé, l’ELAS, organise des maquis dans les zones montagneuses de Thessalie, de Macédoine et d’Épire. En Macédoine, des groupuscules de Grecs fidèles la mémoire du populiste Iaonnis Metaxas luttent contre l’occupant bulgare et seront exterminés par les communistes de l’ELAS (Dzelepy, 1946).
En septembre 44, l’ELAS se lance courageusement à l’assaut des Allemands qui retraitent et de leurs associés grecs du bataillon de sécurité. Ils s’attaquent surtout, dans le Péloponnèse et en Macédoine, aux résistants monarchistes : on se positionne pour les élections d’après-guerre. Les communistes se comportent en assassins, pillards et en tortionnaires, ne respectant pas les prisonniers, même blessés (Hondros, 1983). Les tueurs, saboteurs et instructeurs du SOE britannique ne font pas non plus dans la dentelle : ils sont bien implantés dans le Taygète (au Sud du Péloponnèse), entre Sparte et Kalamata, et à l’Ouest, en Messénie, où ils se comportent comme les plus acharnés des résistants (Hondros, 1983).
Le 22 février 1944, aux Communes, pour éviter une interpellation sur son aide aux groupes communistes en Yougoslavie et en Grèce, qui avait indisposé l’éditorialiste de The Observer, le 10 décembre 1943, Churchill déplore de façon hypocrite les tueries entre groupes de résistants grecs. En représailles, au mois d’avril 44, les communistes grecs déclenchent des mutineries parmi les soldats et les marins grecs de la 8e armée britannique et de la Royal Navy. Churchill en profite pour exiger le remplacement du calme Tsouderos par Sophocles Venizelos, aussi agité que l’était son père ; cette révolution de palais du 14 avril ne lui donnant pas satisfaction, il fait remplacer, trois jours plus tard, le Crétois par un richissime « socialiste » affairiste athénien : George Papandreou (Dzelepy, 1946).
La grève des soldats communistes grecs de la 8e armée a fâché Churchill au plus haut point : il ordonne au nouveau premier ministre grec de rompre avec l’EAM et l’ELAS, ce qui est annoncé officiellement le 6 juillet 1944. Le roi George II passe à Londres le 1er septembre pour tenter de calmer la colère du délicieux homme qui dirige la politique britannique. Il n’y parvient pas et l’ELAS lance mi-septembre une guerre civile qui ne cessera qu’en 1949, faisant plus de victimes que les luttes entre résistants et occupants allemands ou italiens, aidés de volontaires grecs, durant les années 1942-44 (Hondros, 1983 ; Geromlymatos, 2016).
Durant l’Occupation, Ioannis Rallis, ex-ministre conservateur, a succédé au gynécologue Konstantinos Logothetopoulos, qui avait remplacé en décembre 42 le général Giorgis Tsolakoglou comme premier ministre. Contrairement à ses prédécesseurs, Rallis tente d’être efficace dans l’administration des affaires courantes, d’avril 1943 jusqu’au départ des allemands en octobre 1944. Pour combattre les terroristes communistes, il a créé un bataillon de sécurité, fort d’un millier de volontaires dénommés « Rallides ». Comme partout ailleurs, les communistes sabotent des installations militaires, massacrent des soldats isolés et des « ennemis de classe », puis la répression s’abat sur le village où ont été commises les atrocités des gens de l’ELAS… et les grands historiens ne déplorent que les victimes de la répression. Les deux plus célèbres « atrocités » grecques de cette période ne sont que des opérations de représailles.
Le 16 février 43, en Thessalie, de glorieux résistants de l’ELAS massacrent 9 soldats italiens, les torturant jusqu’à ce que mort s’en suive. Le lendemain, le général Cesare Benelli fait raser le village de Domenikon où a eu lieu la tuerie ; tous les hommes du village sont interrogés et 150 d’entre eux sont exécutés, les 17 et 18 février. On peut noter qu’en avril 1943, a lieu une bataille entre Italiens et résistants communistes dans les Météores. Les Italiens restent maîtres du terrain, ne découvrent pas de PG italien assassiné ; il n’y a donc pas de représailles sur la population civile (Gerolymatos, 2016).
Au Nord du Péloponnèse, dans le village de Kalavryta, début décembre 1943, 79 prisonniers allemands sont assassinés par des tueurs de l’ELAS. Deux Allemands parviennent à s’enfuir et à rejoindre leur unité, la 117e DI de montagne. Le Generalleutnant Karl v. Le Suire dirige l’opération de combat le 13 décembre, durant lequel 438 communistes sont tués en opération ou fusillés et 250 civils meurent lors des combats qui détruisent le village.
L’Occupation de la Grèce et de la Crète & la lutte contre les partisans ont coûté la vie à 240 soldats allemands (y compris les disparus) et fait 130 blessés ; le bataillon grec de sécurité et les forces de police ont perdu 1 200 morts et disparus en plus d’un millier de blessés. Chez les Résistants de toutes variétés, on déplore 3 300 morts et disparus et 1 750 capturés, emprisonnés ou expédiés en camps de concentration (Hondros, 1983)… en imaginant que tous les déportés soient morts, ce qui ne fut pas le cas, les 5 000 victimes de la répression germano-italienne ont un poids démographique fort différent des deux centaines de milliers de morts liées à la famine, mais leur poids historiographique est curieusement bien plus lourd !
Il est grand temps de cesser de raviver les souvenirs peu reluisants nos guerres intestines. Les Allemands peuvent reprocher aux Francs de Charlemagne les tueries de Saxons ; ils peuvent reprocher à toutes les nations d’Europe occidentale, centrale et scandinave le génocide de la Guerre de Trente Ans (1618-1648), où 40% de la population germanique a été exterminée. Ils peuvent nous reprocher les ravages du Palatinat sous Louis XIV et les exactions des armées de la Ière République et du Premier Empire.
Aucune nation européenne n’est exempte de crimes commis à l’encontre de ses voisins. Il serait peut-être bon d’arrêter le rabâchage des vieilles histoires des années 1914-45, dont la triste conclusion fut l’asservissement de la moitié de l’Europe à la barbarie et à l’inefficacité économique soviétiques et le passage de l’autre moitié à l’hédonisme made in USA.
L’Unité européenne est à faire. Elle restera mission impossible tant que l’on n’écrira pas l’histoire honnête de notre passé, pour en déduire ce qu’il ne faut en aucun cas recommencer.
Indications bibliographiques
E. N. Dzelepy : Le drame de la Résistance grecque, Éditions Raisons d’Être, 1946
A. Gerolymatos : An international civil war. Greece, 1943-1949, Yale University Press, New Haven [Connecticut], 2016 (un livre assez clair pour une histoire très embrouillée)
J. L. Hondros : Occupation & Resistance. The greek agony 1941-1944, Pella, New York, 1983
J. van der Kiste : Kings of the Hellenes. The greek kings, 1863-1974, Sutton, Stroud, 1999
A. C. Smith and Al. : The german campaigns in Balkans (spring 1941), Center of Military History – United states Army, Washington [D.C.], 1986 (première édition de 1953)
T. M. I. : Procès des grands criminels de guerre devant le Tribunal Militaire International de Nuremberg, 14 novembre 1945 – 1er octobre 1946, 41 volumes, 1947