par Rémi VALAT-DONNIO, de notre correspondant au Japon.
Concernant le confinement, s’agissant d’un phénomène « inédit », les autorités japonaises auraient été prises de court. Les écoles sont fermées, mais les enfants vont dans les établissements qui font office de garderie. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, il n’y a que très peu de personnes qui portent un masque en province, dans les campagnes, il y en a nettement plus en ville. En périphérie, on croise les gens à distance. En réalité il est fait appel à la responsabilité collective, même si il y a eu des pénuries de papiers toilettes et de masques.
On dénombre actuellement 88 décès du Covid-19 au Japon et autour de 5000 cas confirmés.

Le gouvernement vient tout juste de déclarer l’état d’urgence jusqu’au 6 mai dans sept préfectures du pays, dont Tokyo et sa périphérie.(https://www.parismatch.com/Actu/International/Etudiants-robots-clip-d-avertissement-Le-Japon-lutte-a-son-tour-contre-le-coronavirus-1681609) Mais l’exécutif est accusé d’agir trop timidement et trop tardivement.Très alarmiste, la gouverneure de Tokyo, Yuriko Koike, cherche à fermer la plupart des commerces et des usines de la mégalopole, où 1 500 cas d’infection sont dénombrés dans une nébuleuse urbaine de 38 millions d’habitants. La responsable a fini par établir une liste de commerces priés de baisser le rideau à partir du samedi 11 avril et ce jusqu’au 6 mai après avoir surmonté ses différends avec les conseillers du Premier ministre Shinzo Abe sur l’étendue de ces fermetures. En fait, le Premier ministre ne souhaite pas sacrifier l’économie sur l’autel de la pandémie et propose que plusieurs secteurs clefs de l’économie à Tokyo – certaines industries, les transports, les restaurants, les bars publics, les salons de coiffure, les grands magasins – restent ouverts. Aussi le détail des mesures de confinement et le calendrier de leur mise en œuvre dans la capitale ont fait l’objet d’intenses tractations.
Le ministre de l’Économie, Yasutoshi Nishimura, a demandé pour sa part à la gouverneure de Tokyo de reporter de deux semaines certaines fermetures de commerce. Les entreprises, elles, refusent tout confinement, tant que le plan de soutien à l’économie n’inclura pas des compensations pour leurs pertes de revenus. Le gouvernement a présenté une enveloppe de 108 000 milliards de yens, soit 916 milliards d’euros, l’équivalent de 20% du PIB nippon. Le ministre de l’Économie préside aussi le comité chargé de mener la lutte contre l’épidémie à l’échelle nationale, ce qui suscite de vives critiques dans le monde médical. Au Japon, l’état d’urgence ne comprend pas de confinement obligatoire, ni de sanction en cas de non-respect des consignes.
De leur côté, les dirigeants de Kyoto ont demandé aux touristes de ne pas venir dans l’ancienne capitale impériale.Dans certaines préfectures, il y a eu des maladresses de la part de préfet (qui voulait entre autres choses faire revenir les touristes de Tôkyô), maladresses immédiatement exploitées par la presse locale (au Japon, les « préfets sont élus).
Nonobstant, on sent depuis quelque temps monter un système inspiré du chinois et du singapourien, traçage des gens et de leurs activités jusque dans les moindres détails. Le système « My Number », un numéro unique pour toutes les activités sociales des individus, est quelque chose d’inimaginable en France. La télévision y travaille consciencieusement au travers de reportages où les vilains délinquants (qui sont à des niveaux vraiment inférieurs de nos racailles des cités), des gars commettant des infractions routières, voire l’autre jour un voleur de pots de fleurs (ici il n’y a pas de nains de jardins) sont filmés, identifiés et jetés au pilori médiatique. Aussi, l’idée de pouvoir isoler socialement des individus à l’aide des moyens modernes de contrôle fait très vite son chemin et s’impose dans l’opinion publique. Les caméras embarquées et la société ALSOK (une société omniprésente de sécurité) ont le vent en poupe.
Concernant la faible mortalité, outre la suspension des grands rassemblements, s’ajoute le fait que les Japonais ont intégré depuis longtemps la culture du risque et portent régulièrement longtemps des masques même pour un simple rhume. Ici l’hygiène est importante, et la saleté (ou souillure dite kegare), est un tabou religieux.
