par Michel LHOMME
Comme il fallait s’y attendre après la vague de violences qui a affecté les établissements scolaires et les transports, il y a quinze jours à la veille des vacances de printemps, les personnels des transports scolaires viennent d’annoncer qu’ils exerceront un droit de retrait illimité à compter du 16 mars prochain. Coup de force ? Chantage ?
Hier, une réunion officielle sur la sécurité réunissait la préfecture, le conseil départemental, les forces de l’ordre, le rectorat, des associations et les représentants syndicaux du syndicat FO transports et logistique. Une fois de plus, le préfet Jean-François Colombet, à la figure de plus en plus tartarinesque souhaitait réfléchir aux moyens pour endiguer la violence, soit en traduction sans langue de bois comment la freiner sans moyens mais surtout sans volonté politique de s’attaquer à la racine du problème. Or quelle est la racine du problème mahorais ? La surpopulation, la déscolarisation, les quartiers déshérités, les frontières ouvertes, les arrivées de kwassas quotidiennes avec de plus en plus d’Africains, le ballet des rafles inutiles des clandestins mais très lucratives pour certains. Depuis quelques semaines, on peut réellement dire que la situation a totalement dérapé à Mayotte et l’on a même vu les compagnies de sécurité reculer devant les voyous dans les rues de Kaweni après le pillage des magasins.
Alors, préfet, recteur, élus locaux, tous champions de l’incompétence manifeste, dévoilent une énième fois un plan foireux au sein de l’hémicycle départemental, un plan de sortie de crise qui a fait hier sourire plus d’un Mahorais. Mais il y a plus grave : ce nouveau plan entérine publiquement et quasi officiellement le lâchage de l’Etat. Il décide en effet de payer des milices, à savoir le plus souvent des voyous « reconvertis » pour assurer la sécurité des bidonvilles qui, rappelons-le aussi, sont la plupart du temps des occupations de terrain illégales que l’Etat même après jugement en faveur des propriétaires mahorais de souche se refuse toujours d’expulser au nom de dites « menaces à l’ordre public ».
Depuis plus de six mois la situation sécuritaire se dégrade de façon impressionnante à Mayotte. Elle s’accompagne d’un recours inquiétant à une violence de plus en plus importante et récurrente avec vols à la tire, coupeurs de route, émeutes et même pillage il y a quinze jours. Désemparés face à l’abandon par l’Etat d’une de ses prérogatives les plus régaliennes, les habitants de Mayotte sont à bout comme on le verra plus bas dans les derniers incidents qui se sont déroulés cette semaine à Doujani à la sortie sud de Mamoudzou, le chef-lieu.
Désemparé, le préfet de Mayotte a donc décidé de concentrer sa réponse en confiant la sécurité des Mahorais aux mains de milices comme l’a indiqué la conférence de presse donnée ce 11 mars par le délégué du gouvernement à Mamoudzou. Les milices, on les appelle ici, provocation à la française : les « maillots jaunes ». On en recrutera en nombre par l’intermédiaire d’associations le plus souvent de sans papiers généreusement subventionnés sur l’ensemble du territoire, ils opéreront avec une courte formation, et pour l’instant quelques tickets repas (sur quel budget ? sur quelle caisse noire de la préfecture ?). Ainsi, dorénavant, pour l’Etat français, la sécurisation du territoire peut être confiée à des ressortissants de nationalité étrangère, des maillots jaunes dont on achète en quelque sorte le silence complice pour la paix des quartiers.
Le député républicain du cent-unième département français, Mansour Kamardine face à ces déclarations proprement scandaleuses à réitérer sa demande d’organisation d’assises de la sécurité que le premier Ministre en personne Edouard Philippe lui a d’ailleurs il y a quelques jours officiellement refusé.
Pourtant, la situation ne cesse de dégénérer sur le territoire. Alors que le département était en vacances scolaires, ce lundi, pendant près d’une heure, de violents affrontements ont opposé en fin de matinée un groupe d’une vingtaine de jeunes contre les forces de l’ordre à Doujani. Des violences urbaines qui ressemblaient certes à toutes les autres, jusqu’à ce qu’un groupe d’automobilistes et de riverains s’en mêlent. L’intervention d’une efficacité redoutable repoussa les voyous que la police laissait faire par peur d’intervenir martialement. C’est à Mayotte un précédent unique et pour le moins inquiétant concernant la réalité sur le terrain du pouvoir régalien de l’Etat.
En fait, face à l’inaction de l’Etat depuis des années en matière de contrôle des frontières, de démantèlement des zones de non-droit, face à sa faiblesse récurrente devant le chantage comorien, la préfecture n’a qu’une seule proposition : le retour des milices et les rafles. Le peuple aurait ainsi commencé à lui répondre par la justice par soi-même.
A Doujani, cette semaine, chauffé à blanc par les rodomontades et les billevesées des autorités en place, un groupe de citoyens s’est engouffré dans une rue à la poursuite des jeunes mis en fuite. Les policiers impuissants depuis des semaines en sont restés bouche bée. Peu à peu, la situation s’est de fait calmé, les automobilistes sont retournés à leur volant et la circulation fut rétablie, les jeunes délinquants la plupart mineurs ayant entre douze et dix-huit ans, courant se percher sur les hauteurs du village, en toisant et invectivant les forces de l’ordre traitées de » lâches » restées au pied de la colline.
Le constat est accablant : les forces de l’ordre ne servent presque plus à rien à Mayotte, elles sont tétanisées et comme paralysées par les choix en réalité politiques du gouvernement français. C’est d’ailleurs le cas dans nombre de quartiers de l’hexagone ou d’outre-mer. Il ne reste dans ce cas effectivement pour une République en déconfiture que de s’en remettre comme en Grèce aux milices organisés ou pour demain à prendre notre sécurité en main. A Mayotte, la police vous dissuade de porter plainte, ne répond pratiquement pas au coup de téléphone pour les agressions quotidiennes de rue, prend un temps infini pour se déplacer et tremble dans sa culotte face à des gamins de quinze ans, qui de fait seront immédiatement relâchés une fois arrêtés car la Justice n’ose même pas faire payer par des condamnations réelles les parents responsables alors que la loi française le permet.
La réacion populaire de Doujani cette semaine est bien un précédent. L’Etat en mesure-t-il les conséquences sur son image future et la compréhension de sa politique territoriale ? Ce précédent donne vie à la colère teintée de haine qui monte de plus en plus à Mayotte non sans un relent d’ailleurs de xénophobie déplacée entre des peuples frères et cousins. Il y a maintenant peut-être la volonté d’en découdre avec les jeunes et de ne plus s’en remettre aux bonnes paroles de l’Etat. C’est une nouvelle donnée que les autorités devront très vite prendre en compte et elles l’ont fait en réalité mais de la pire des manières par la « légalisation » de milices d’auto-défense, source évidente de corruption sur le long terme ?
En tout cas, le “Plan pour l’avenir de la jeunesse” qu’a présenté conjointement le Département et la Préfecture ce mercredi demeure totalement vide, inepte, honteux : aucune mesure forte de sécurité n’a en réalité été prise voire même promise.

