Michel LHOMME
Nous sommes de ceux qui croyons au Droit et en particulier au Droit constitutionnel. Le mari de Claire Brétécher, le défunt socialiste rocardien Guy Carcassonne aimait à répéter que tout en politique se règle d’abord sur le papier. La crise des gilets jaunes avec ses neuf morts et ses nombreux blessés, ses faillites d’entreprises et de magasins à venir aurait pu être évitée s’il n’y avait pas une Assemblée nationale de godillots, élue plébiscitairement après le second tour des élections présidentielles, s’il y avait eu des élections législatives de mi-mandat, si l’on n’avait pas touché au septennat. Franck Buleux, notre collaborateur a relevé aussi la nécessité d’un changement constitutionnel profond, d’une Sixième République que pourrait accoucher peut-être une Assemblée constituante en marche (https://metainfos.com/2018/12/10/macron-et-le-retour-anticipe-aux-urnes/ et https://metainfos.com/2018/12/09/le-suffrage-majoritaire-uninominal-une-aberration-francaise/ ). Face à la crise qui s’est sans doute que momentanément calmée en raison des traditionnelles trêves des confiseurs, la dissolution est la solution la plus rationnelle et la plus ordonnée, la plus pacifique (https://metainfos.com/2018/12/11/macron-en-operation-pieces-jaunes-derniers-mensonges-avant-dissolution/). Mais on parle entre temps de multiples changements à apporter à la Constitution, comme le RIC (le Référendum d’Initiative Citoyenne), une forte dose de proportionnelle. Nonobstant, il est un autre article qui nous semple important voire urgent de revoir et de réviser, c’est l’article 40 de la Constitution.
Cet article retire de facto aux députés et aux sénateurs l’initiative de la dépense publique. L’article pose en effet une condition majeure au dépôt d’amendement parlementaire : celui-ci n’est pas recevable s’il a pour effet d’augmenter les dépenses publiques. Cette restriction est justifiée par le souci d’éviter tout dérapage budgétaire mais ce garde-fou restreint de fait les pouvoirs des parlementaires. Certes, c’est une sorte de bouclier budgétaire pour tout gouvernement mais ce dernier ne s’en sert que comme un outil politique afin d’éviter l’examen de certains amendements. En 2008, lors de la révision constitutionnelle lancée par Nicolas Sarkozy, les présidents des commissions des finances à l’Assemblée et au Sénat, Didier Migaud et Jean Arthuis, avaient déjà plaidé, en vain, pour la fin de ce qu’ils avaient qualifié alors de « forme d’autocensure parlementaire ».
En fait, sur la question budgétaire et ses dépenses, le seul législateur en France, c’est l’exécutif et il s’agit d’une véritable aberration eu égard aux modèles démocratiques externes. La disparition de l’article 40 s’impose donc comme nouvelle garantie démocratique constitutionnelle, redonnant de la valeur au travail parlementaire de demain. On s’étonne que personne ne monte actuellement au créneau pour la suppression nécessaire de cet article qui déresponsabilise pourtant totalement le Parlement c’est-à-dire le Peuple.
D’ailleurs, en décembre 2017, l’un des groupes de travail transpartisan sur la réforme de l’Assemblée nationale jugeait, je cite, que « la question de l’article 40 mérite d’être débattue car elle reflète une conception du parlementarisme héritée des débuts de la Vème République qui n’a nullement su empêcher la dérive des finances publiques ». La dernière remarque que nous soulignons est juste car cet article 40 n’a nullement empêché de mettre un frein à la dérive de la dette publique, en particulier dans les dépenses sociales liées à l’éducation, à la santé publique, à l’immigration, véritable gouffre financier du pays.
Or, la suppression de l’article 40 obligerait à mesurer le coût des amendements, leur impact financier et ainsi de réguler la dépense de l’exécutif qui n’est aujoud’hui quasiment contrôlé qu’a posteriori par les rapports immédiatement enterrés des commissaires de la Cour des Comptes.