Par Michel LHOMME
La faible performance des Républicains et la « toxicité » de la figure médiatique et diabolisée de Trump soulèvent des questions sur l’avenir de la candidature de celui-ci à la présidence du Parti républicain en 2024.
Les États-Unis ont tenu leurs traditionnelles élections de mi-mandat le 8 novembre. Les citoyens américains ont réélu la totalité de la Chambre des représentants (435 sièges) et un tiers (35 sur 100) des Sénateurs. L’équilibre des pouvoirs au sein du corps législatif américain et d’une partie du système judiciaire dépend du résultat des élections.
Résultats préliminaires
En date du 11 novembre 2022, Le sénateur démocrate, Mark Kelly, a été réélu en Arizona, vendredi 11 novembre dans la soirée. Le parti du président Joe Biden ne serait alors plus qu’à un siège de conserver la majorité à la chambre haute.
Le sénateur démocrate sortant, Mark Kelly, a été réélu, vendredi 11 novembre 2022. Les résultats sont encore extrêmement serrés, mais le camp démocrate serait à une voix de la majorité au Sénat. 49 sénateurs républicains, 49 sénateurs démocrates. Il ne reste plus que deux sièges à attribuer, dans le Nevada et en Géorgie. Un second tour est prévu en Géorgie le 6 décembre, aucun des candidats n’ayant réussi à emporter 50 % des suffrages en raison d’un outsider libertarien original. Un scrutin très serré, donc mais qui avantage pour l’instant les démocrates. Ils leur suffiraient d’emporter l’un de ces deux sièges pour avoir une majorité. En cas d’égalité parfaite, c’est à la vice-présidente, Kamala Harris, de départager la chambre haute. Cette dernière, démocrate, ferait donc pencher la balance du côté des siens. Quant à la chambre des représentants, longtemps donnée acquise aux républicains, ce samedi 12 novembre, 211 républicains y siègeront contre 203 démocrates. La majorité est de 218 sièges, laissant courir encore un peu plus le suspens.

Les Républicains ont perdu au profit de leurs adversaires deux États de la côte atlantique: le Maryland et le Massachusetts. Dans le même temps, les deux partis ont conservé de grands États. Le parti démocrate a conservé le contrôle de la Californie, de New York, de la Pennsylvanie. Les Républicains contrôlent le Texas et la Floride. L’issue de l’élection en Arizona, un autre État qui pourrait changer le républicain au poste de gouverneur pour le démocrate, n’a pas été décidée : la lutte a été serrée entre le favori du vote populaire, un Trumpiste, Carey Lake, et la candidate démocrate, Kathleen Hobbs. Cette dernière a pris une avance inattendue.
L’ancien président américain Donald Trump a déjà appelé à des protestations. Il a déclaré que des obstacles artificiels au vote avaient été créés pour les électeurs républicains, en particulier dans les régions qui votent traditionnellement pour le parti républicain. En Arizona, par exemple, il y aurait eu des dysfonctionnements dans les machines à voter, notamment dans les districts républicains. Ainsi, de nombreux électeurs républicains qui se sont rendus aux urnes n’ont pas pu voter avant la fermeture des bureaux de vote.
Dans un autre État, la Pennsylvanie, il y avait une pénurie de bulletins de vote dans les bureaux de vote, mais un avantage artificiel a été créé pour les démocrates qui préfèrent le « vote par correspondance ». Le candidat démocrate au Sénat, John Fetterman, et les membres de son parti qui contrôlent la branche exécutive de l’État insistent pour que les enveloppes de scrutin soient comptées même si elles ne portent pas de date de vote. C’est grâce à de tels votes par correspondance, invérifiables, que le démocrate Joe Biden a remporté l’élection présidentielle américaine de 2020. Aujourd’hui, le parti démocrate américain utilise à nouveau la même technique.
Implications de ces élections pour les États-Unis
Le résultat des élections montre, tout d’abord, que la société américaine et les élites américaines restent polarisées et que l’Amérique risque réellement l’implosion, la sécession. Une fois encore, il y a deux Amériques sur la carte électorale : l’Amérique « bleue » des démocrates – les grandes villes et les côtes du Pacifique et de l’Atlantique – et l’Amérique « rouge » du cœur territorial républicain.
Ces élections montrent aussi, comme en France, le contrôle total du jeu politique par les journalopes, les vrais chiens de garde du système avec les enseignants.
Dans le même temps, sur fond de crise économique et énergétique, d’injection constante d’argent en Ukraine dans le conflit avec la Russie, conflit qui est assez impopulaire auprès de l’électorat, et de crise migratoire, les résultats de l’équipe de Joe Biden semblent paradoxalement bons et ont surpris tous les commentateurs.
Si le résultat s’explique par l’utilisation de mécanismes de manipulation des votes, par le contrôle des élites de gauche sur les médias et par la plus grande discipline du parti démocrate, les Républicains en portent aussi la responsabilité car ils se sont battus non seulement contre les démocrates, mais aussi entre eux. Certes si grâce à une lutte sans compromis, Donald Trump a pu porter ses candidats contre la position de l’establishment, ce sont tout de même ces candidats qui ont rencontré le plus de difficultés et de pression de la part du système administratif. En outre, il a existé des tensions très vives entre Donald Trump et un autre prétendant à la direction informelle du parti, le gouverneur de Floride Ron Desantis.

Implications pour le monde
La défaite relative des Républicains ne sera donc pas susceptible d’entraîner des changements sérieux dans les politiques intérieures et étrangères de l’administration de Joe Biden.
Ce qu’il faut garder à l’esprit, c’est que le contrôle total des médias par les Démocrates et les divisions au sein des Républicains, permettra à l’administration de Joe Biden de poursuivre ses politiques précédentes. Cela est particulièrement vrai sur le front de la politique étrangère et de la confrontation à la Russie et à la Chine, où seule une minorité (bien qu’active) de Républicains ayant réussi à se faire élire au Congrès s’oppose au conflit avec Moscou, mais où presque personne n’est en faveur de relations amicales avec la Pékin.
Donc on peut en déduire que le soutien monétaire et militaro-technique à l’Ukraine se poursuivra. Une augmentation du soutien américain à Taïwan est fortement probable.
La faible performance des Républicains et la « toxicité » de la figure médiatique et diabolisée de Trump soulèvent donc des questions sérieuses sur l’avenir de la candidature républicaine de celui-ci à la présidentielle de 2024. Il pourrait être remplacé par un gouverneur de Floride plus jeune, Ron Desantis (photo), qui a remporté les élections au poste de gouverneur le 8 novembre avec une marge de 20 %.
Alors qui est Ron Desantis, probable futur président ?

Ce dernier est conservateur en matière de politique intérieure, mais il est jeune et énergique et donc plus attrayant pour les électeurs que le scandaleux et vieillissant Trump. Desantis adhère aux idées républicaines traditionnelles en matière de politique étrangère: une certaine agressivité verbale, une opposition à la Russie, un soutien à l’Ukraine, la lutte contre les régimes de gauche d’Amérique latine, une rhétorique antichinoise, l’appui inconditionnel à Israël bien sûr au Moyen-Orient et l’Iran comme ennemi. Rien de bien nouveau mais un candidat plus acceptable pour les sponsors républicains traditionnels que Trump et peut-être moins interventionniste.
Reste que Bident est au pouvoir, qu’il est sénile et pas à l’abri d’une mort subite qui propulserait la woke Kamala Harris au pouvoir. Dans les coulisses, on s’active pour l’éliminer et la remplacer par le faucon néo-straussien radical, l’actuel secrétaire d’Etat, Anthony Blinken, un vrai danger mondial.
In fine, aux États-Unis, la déferlante rouge républicaine n’a pas eu lieu : contrairement aux prévisions, le Parti républicain n’a pas écrasé le Parti démocrate lors des élections de mi-mandat, qui visent à renouveler la Chambre des représentants et une partie du Sénat. Mais le négationnisme électoral inquiète et prouve une nouvelle fois que les États-Unis vivent une véritable crise démocratique.