Qui est Rishi Sunak, le nouveau Premier ministre indien du Royaume-Uni ?
par Scipion de Salm (extrait)
«Rishi Sunak a réussi, en octobre 2022, après un premier échec cet été, à être désigné par le Parti Conservateur comme son chef. Ce chef est aussi, depuis le 25 octobre, le nouveau Premier ministre du Royaume-Uni, puisque la majorité parlementaire n’a pas changé, celle élue sous le patronage de Boris Johnson le 19 décembre 2019, avec 365 sièges sur les 650 de la Chambre des Communes (la majorité absolue est fixée à 326). S’ils ont renversé deux de leurs chefs, Boris Johnson, puis Liz Truss, ces députés conservateurs sont demeurés à peu près unis entre eux. Qui est vraiment Rishi Sunak ? Quel est le contexte politique, difficile, auquel il doit faire face ?
RISHI SUNAK, UN BANQUIER INDIEN EN ANGLETERRE
Rishi Sunak est certes né au Royaume-Uni à Southampton, en 1980, ce que mettent en valeur tous ses partisans, opposant ce lieu de naissance à celui de Boris Johnson, né à New York, aux Etats-Unis. Néanmoins, il est manifestement Indien. Il en possède tous les référents culturels fondamentaux. Il est l’époux d’une millionnaire indienne, Akshata Murty. La famille est hindouiste ; les enfants ont des prénoms indiens. Rishi Sunak confesse volontiers publiquement une pratique hindouiste stricte, avec un végétarisme rigoureux.
Rishi Sunak a mené une première carrière dans la finance, chez Goldman-Sachs. Grand banquier d’affaires, il maîtrise techniquement les questions financières, contrairement à Liz Truss. Cependant, même les libéraux de conviction, ceux qui célèbrent par principe le capitalisme, et son esprit d’audace et d’invention, n’apprécient pas son profil de millionnaire par mariage. Tout laisse à penser qu’il n’est vraiment pas aimé par la base du Parti Conservateur. Evidemment, un “milliardaire” — ce qui est légèrement excessif, sa fortune avoisine les 800 millions d’euros — est un épouvantail commode pour les Travaillistes ; le fait qu’il soit « vegan racisé » ne change rien à l’affaire.
Puis, Richi Sunak a quitté les affaires pour la politique en 2015. Il a été, lors du scrutin uninominal à un tour, élu (en 2015, avec 51 % des voix) et réélu largement (en 2017, puis 2019, avec 64 %) dans une circonscription du Nord de l’Angleterre (Richmond, dans le Yorkshire du Nord), historiquement acquise au Parti Conservateur ; elle avait été celle, de 1989 à 2015, de l’ancien chef du Parti Conservateur, William Hague, opposant malheureux à Tony Blair.
Du fait de ses compétences financières, il a été nommé par Boris Johnson Chancelier de l’Echiquier, fonction exercée de février 2020 à juillet 2022. Il a été l’un des ministres majeurs dont la démission, le 5 juillet 2022, a précipité la chute de Boris Johnson. Dans cette ambiance particulière au Parti Conservateur, très délétère, et comme il n’a guère montré un exemple de fidélité dans un passé très récent à son supérieur hiérarchique, pourra-t-il compter sur la loyauté de ses ministres ? Ce n’est pas certain.
Après deux épisodes de mutineries des ministres et des députés, le Parti Conservateur peut-il encore être contrôlé, et le Premier ministre issu de ses rangs gouverner ? Les observateurs en discutent. Si Rishi Sunak échouait à tenir son gouvernement et sa majorité, et même si rien ne l’y oblige constitutionnellement, la pression politique serait alors très forte pour la tenue d’élections législatives anticipées. Après un tel spectacle, le Parti Conservateur serait balayé. On peut donc plutôt anticiper, que, par intérêt bien compris, ministres et députés soient enfin loyaux au Premier ministre.
UN PAYS QUI N’EST PLUS GOUVERNÉ, ET QUI DEVRAIT SE BATTRE POUR SA SURVIE
Nous avions constaté, la semaine passée, la multiplication des fractures politiques au sein du Parti Conservateur : il y a eu un divorce net entre les députés et les militants du parti ; cependant les députés sont peut-être restés plus proches des électeurs que les militants, moins de 200 000, vivant quelque peu dans un monde à part, coupé des réalités du pays ; cela arrive parfois. Les députés ont imposé aux militants le départ de Boris Johnson, puis de Liz Truss, avec le constat très rationnel de l’incompétence de ces deux personnalités pour diriger le pays, en particulier durant des heures difficiles.
Le processus de Brexit, démarré par le référendum du 23 juin 2016, enfin réalisé le 1er février 2020, est toujours en cours, avec des modalités pratiques complexes : le Royaume-Uni est-il désormais pleinement séparé de l’Union Européenne, ou sous un régime d’union douanière avec elle, ou quasiment ? Ce n’est vraiment pas clair, et cela dépend des marchés ou des produits, ou des services concernés, ce qui est un cauchemar administratif très perturbant. Il aurait fallu choisir clairement une des deux options, ce qu’a été incapable de faire Boris Johnson, tout comme d’ailleurs son prédécesseur Theresa May. Le règne du flou, des contradictions permanentes, dans la direction des Etats européens, est assez général depuis les années 2000, et Macron en France en est un représentant typique. Les conséquences de cette attitude ont été calamiteuses lorsqu’il a fallu faire des choix clairs, comme au Royaume-Uni.
Ce flou général à Londres a aussi favorisé les agitations politiques séparatistes en Ecosse, comme en Irlande du Nord, où elles sont majoritaires, ce qui pourrait conduire à terme à l’éclatement du Royaume-Uni. Cette perspective paraît d’autant plus atteignable que Londres donne de moins en moins l’impression de gouverner vraiment l’ensemble. Les ambiguïtés permanentes ont lassé jusqu’aux Loyalistes d’Irlande du Nord, très remontés contre l’application concrète du Brexit, qui a créé une frontière économique en Mer d’Irlande, les rattachant de facto sur le plan douanier à la République d’Irlande — et donc à l’UE —, ce dont ils ne veulent à aucun prix. Ils sont d’autant plus excités qu’ils pressentent leur prochain abandon par Londres, et qu’ils se savent depuis quelques années minoritaires dans les urnes en Ulster, après un siècle de domination incontestée ; la démographie plus dynamique des catholiques irlandais a permis sur un siècle ce basculement démographique, même, si hélas, depuis les années 1990, la natalité de tous les Blancs, catholiques comme protestants, a fini par s’effondrer.
LA QUESTION MIGRATOIRE
Un des grands arguments en faveur du Brexit avait été la maîtrise des flux migratoires. Qu’en est-il désormais ? Le Grand Remplacement se poursuit, à un rythme accéléré et visible, avec à la fois la population allochtone déjà présente, et des flux toujours maintenus en provenance de l’étranger lointain. Les seuls flux restreints, et peut-être inversés, seraient ceux concernant les pays européens : le près d’un million de Polonais au Royaume-Uni rentrerait en partie chez lui — on recense quelques centaines de milliers de retours —, les difficultés administratives causées dans le cadre du Brexit se combinant avec les perturbations graves de l’économie liées à l’hystérie covidesque, puis, récemment, à la guerre économique totale contre la Russie. L’Ecosse est affectée autant que l’Angleterre par le phénomène de l’immigration massive, avec une domination culturelle de la gauche wokiste encore pire, et une éventuelle indépendance prendrait de drôles de couleurs, et serait tout sauf la résurrection d’une nation écossaise traditionnelle et authentique.
Cette Diversité croissante, avec un gros tiers au moins de naissances allogènes à l’échelle nationale, est tout sauf un phénomène harmonieux. Le seul point “positif”, comparativement, est qu’elle est un peu plus laborieuse que son équivalent en France, sans que le bilan économique, même sur le seul plan comptable, soit positif pour autant. La cohabitation se passe globalement mal avec les autochtones. En outre, les conflits extérieurs sont importés, en particulier une haine vigoureuse entre les Pakistanais et les Indiens. Les millions de Pakistanais de Grande-Bretagne, loin de célébrer l’ascension au sommet du gouvernement de leur semblable extérieurement, sont furieux de cette promotion ; ils y voient quelque complot islamophobe, quelque alliance des chrétiens, des sionistes, et des hindous contre l’islam. Les musulmans pakistanais ou bengalis au Royaume-Uni attaquent régulièrement les temples ou les processions des hindous ou des sikhs ; lorsqu’ils sont assez nombreux aussi, ces derniers se défendent. Pour l’instant, ces émeutes interethniques, systématiquement tues dans les grands médias, en sont restées au stade des intimidations et des bastonnades, avec très peu de morts ; mais les choses pourraient dégénérer rapidement.
Rishi Sunak, malgré ses origines étrangères, a promis la plus grande fermeté contre l’immigration clandestine ; il s’est entretenu à ce sujet avec le président Macron, qui s’est engagé à défendre la frontière du Royaume-Uni. Il est à craindre pour nos amis britanniques que cette promesse de Macron ne soit aussi peu honorée que tant d’autres, et que le phénomène, récent et croissant, des traversées sauvages de la Manche, ne se poursuive. Cette promesse verbale de Rishi Sunak sur l’immigration clandestine est une constante de tous ses prédécesseurs, depuis au moins Margareth Thatcher dans les années 1980, et plus récemment Boris Johnson et Liz Truss. On constate l’inefficacité visible de ces promesses. En pratique, un clandestin débarqué au Royaume-Uni n’a qu’un risque infime d’être expulsé, aussi peu qu’en France. Le fameux plan rwandais de Boris Johnson, avec la réinstallation par milliers, puis par dizaines de milliers, de demandeurs d’asile manifestement abusifs, est resté lettre morte. Londres se proposait de copier l’Australie et l’entité sioniste, qui, elle, expulse systématiquement les immigrés non-juifs, avec un accord particulier, rémunéré, pour le transfert au Rwanda des populations concernées de couleur. Les quelques procédures engagées au Royaume-Uni ont été suspendues ou annulées par une justice gauchiste, et l’instabilité politique croissante depuis juin 2022.
Même s’il est plus sérieux, ce qui n’est guère difficile, que ses deux prédécesseurs immédiats, Rishi Sunak n’inspire vraiment aucune confiance pour l’avenir du Royaume-Uni. […]
Source (en soutien à Rivarol menacé) : extrait d’article issu du Rivarol, n°3539 du 2/11/2022
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