par Michel LHOMME
La DGSE est consternée par le niveau de ses postulants Dans un document publié discrètement sur le site de recrutement du ministère de la défense, la DGSE ne mâche pas ses mots quant à la dernière fournée de postulants au service en catégorie B (« secrétaire administratif spécialisé »). Selon son rapport du concours externe de la session de janvier 2020, après avoir estimé le niveau global « moyen », le jury a finalement décidé de n’admettre aucun des dizaines de candidats qui se sont présentés aux deux postes d’arabisants ouverts, car « aucun d’entre eux n’a démontré avoir une connaissance suffisante de la DGSE et de ses missions ». Plus globalement, le jury a noté « chez les candidats un manque de préparation et de connaissances rédhibitoire », notamment sur les sujets « relatifs au fonctionnement de l’institution », comme l’organisation de la DGSE, ses missions, son positionnement dans l’appareil d’Etat, voire les problématiques et les enjeux du renseignement. Sans compter les « nombreuses fautes d’orthographe » dans les CV et les lettres de motivation envoyés… Une chance pour les futurs postulants de prendre en compte ces remarques : du fait de la crise du Covid-19, la DGSE a dû reporter tous ses concours à juin, voire septembre. Ce tableau sombre tranche avec les rapports qui ont été faits sur les candidats de catégorie A (attachés et administrateurs), dont certains avaient un « haut potentiel » pour intégrer le service. Cette rebuffade du jury de la DGSE ne va pas arranger à court terme les problèmes de ressources humaines du service : celui-ci doit encore recruter à tour de bras dans les prochaines années.
Par ailleurs, le renseignement pénitentiaire est frappé de plein fouet par le Covid-19. Si l’ensemble des services de renseignement ont subi des cas de Covid-19, le renseignement pénitentiaire est particulièrement concerné. Dès mars, un nombre important d’agents du nouveau Service national du renseignement pénitentiaire (SNRP, ex-BCRP) ont été infectés par la maladie, les locaux du site d’Olympe de Gouges (Paris) devenant un véritable cluster. Le service a aussi dû s’adapter au confinement des prisons, qui a considérablement tendu la situation, plusieurs émeutes ayant éclaté (mutinerie le 18 avril au centre de détention d’Ecrouves en Meurthe-et-Moselle). La baisse importante du nombre de détenus (-10 000 en un mois) a permis de faire baisser la tension et de casser la surpopulation carcérale (on serait maintenant tout juste en dessous des 100% d’occupation). A noter, peu de détenus suivis au titre de la radicalisation (« TIS ») ont été libérés : seule une douzaine de condamnés sont sortis, le plus souvent n’anticipant la date réelle de sortie que de quelques semaines.
Aux Etats-unis c’est l’ouverture d’un nouveau fonds pour contrer la Chine dans le Pacifique face à son expansion militaire par l’accentuation de la présence militaire US dans la zone indo-Pacifique. Le représentant républicain Mac Thornberry, membre de la commission des forces armées de la chambre des représentants, a ainsi dévoilé le 16 avril un avant-projet de loi pour un fonds de 6 milliards de dollars visant à renforcer les systèmes de missiles, d’infrastructure et d’Intelligence, Surveillance & Reconnaissance (ISR) dans la région. Le projet, intitulé l’Indo-Pacific Deterrence Initiative, financerait notamment des programmes de missiles à Guam et Hawaii, des déploiements par rotation de troupes et de bombardiers, ainsi que la modernisation des systèmes de communication avec les alliés. Le projet vise en plus à mutualiser les besoins budgétaires en matière d’antiterrorisme avec les pays de la région alliés des Etats-Unis. Les domaines cyber et spatial pourraient progressivement être intégrés dans ce programme. Le projet se veut l’équivalent de l’European Deterrence Initiative, créée en 2014 pour rassurer les pays européens de l’est face au regain d’activisme de la Russie.
Après la trêve du COVID-19, la guerre secrète, les hostilités entre Israël et l’Iran sont bien reparties avec le lancement d’un satellite en Iran, des frappes en Syrie et en Irak. Après le choc initial de la crise du Covid-19, qui a particulièrement touché l’Iran, les deux pays semblent prêts à repartir sur le sentier de la confrontation. Si pendant plusieurs semaines, les deux protagonistes avaient stoppé tacitement les hostilités directes et indirectes, entraînant une trêve de facto liée aussi aux élections israéliennes, ces deux dernières semaines, la guerre secrète entre les deux adversaires a repris de plus belle. Le ministre israélien de la défense, Naftali Bennett, a admis publiquement mi-avril que l’armée israélienne avait repris ses opérations contre Téhéran. L’Israel Air Force (IAF) a ainsi mené plusieurs missions contre des milices pro-iraniennes à la frontière syro-irakienne. Elle a aussi frappé un convoi du Hezbollah libanais qui transportait des composants balistiques vers le Liban. Israël continue de se concentrer sur l’arrêt des expéditions de composants pour améliorer la précision des missiles du Hezbollah au Liban et renforcer sa présence en Syrie près de la frontière du plateau du Golan.
Téhéran de son côté reprend du poil de la bête et observe avec beaucoup attention ces opérations israéliennes. Pour sa part, le pays a repris ses opérations via ses milices affidées en Irak et en Syrie, en augmentant le nombre d’officiers Pasdarans (Gardiens de la révolution) présents à ses côtés dans les deux pays. Ces derniers ont surtout réussi le lancement de leur premier satellite militaire. Pour les services israéliens, la seule zone de tranquillité reste les territoires palestiniens. Les relations entre Israël et le Hamas se maintiennent depuis le début de la crise sanitaire. Ces dernières semaines, les deux camps ont intensifié leurs échanges, en particulier de prisonniers. Cependant, les fossés entre les deux parties restent importants. Le Hamas exige la libération d’au moins 250 prisonniers qui purgent des peines de longue durée pour des actes terroristes. Israël est prêt à allouer au plus quelques dizaines d’entre eux en échange des restes des corps de deux soldats des forces armées tués pendant la guerre de 2014 et de deux jeunes civils israéliens malades mentaux qui avaient traversé la frontière avec Gaza. Reste que le lancement du satellite iranien a été scruté de toutes parts car il souligne bien la volonté de ces derniers de reprendre la main, après l’intense crise sanitaire qui a secoué le pays. La communauté du renseignement israélienne suit de près ces progrès. Les services estiment aujourd’hui que les Pasdarans ont réussi leur pari, et que ce satellite va pouvoir rester en orbite pour quelques années, contrairement aux quatre premières tentatives récentes (sans compter les neuf dont les lancements ont raté dès les prémices). Le nouveau lanceur semble avoir les mêmes capacités que le précédent, le Safir, à savoir transporter un petit satellite avec un emport maximum de 50kg, plaçable en orbite terrestre basse. Une altitude utile seulement pour un satellite d’observation – pas de communication. La résolution d’imagerie serait cependant encore très basse – supérieure au mètre, soit celle des premiers satellites israéliens d’observation Ofek lancés il y a trente ans…