BRETONS ET NORMANDS, PEUPLES FRÈRES ? 1/2

Par Christian PACAUD et Pierre LANCE

Nous offrons ici à nos lecteurs pour le week-end propice aux lectures plus érudites la première partie d’un long texte qui sera publié en deux parties (le deuxième texte le prochain week-end) sur l’une de nos plus belles provinces, la Normandie et les Normands. ML.

Le nom d’un peuple, d’une nation ou d’une province est rarement choisi par les principaux intéressés. Comme les individus, les peuples sont le plus souvent nommés par leurs voisins, amis ou ennemis. Un peuple garde parfois le nom de son vainqueur, que lui-même tenait généralement d’autres vaincus. Et ce nom, bien évidemment, a peu de rapports avec le contenu ethnique du pays. Ainsi les Français, quoique tenant leur nom des Francs qui les envahirent lorsque s’effondra l’empire romain, n’ont jamais cessé pour autant d’être des Gaulois, nom que leur donnent encore aujourd’hui les Grecs, pour qui nous sommes les « Gallos »

[Pour exemple, moi je suis païen, les Chrétiens m’ont apposé ce nom qui se veut péjoratif. J’en assume la lettre !! Je suis aussi Breton par mon père et Normand par ma mère]

Normands et Bretons / Celtes et gaulois

De l’enquête de Christian Pacaud, il ressort à l’évidence que, dans leur très forte majorité, nos Normands sont des Gaulois. On peut même assurer que la Normandie, qui faisait autrefois corps avec l’Armorique, appelée depuis la Bretagne, fut l’une des régions les plus fortement celtiques de notre pays. Au temps des Gaulois, on appelait « Armorique »(« territoire prés de la mer ») non point seulement, comme aujourd’hui, la presqu’île bretonne, mais l’ensemble des deux presqu’îles de Bretagne et du Cotentin. Les peuples de cette région formaient une fédération unie par des liens économiques et politiques, recouvrant tout le territoire à l’ouest d’une ligne Caen-Laval-Nantes. Cette fédération fut l’une des premières à combattre Jules César en –56 (après une soumission feinte apparemment destinée à gagner du temps) et l’une des premières également à rejoindre la coalition créée par Vercingétorix en –52. Or, dans les deux cas, les Armoricains furent aussitôt soutenus par les peuples couvrant le reste du territoire de l’actuelle Normandie (Lexoviens de Lisieux, Aulerques Eburovices d’Alençon et d’Evreux, Calètes du pays de Caux, Véliocasses de Rouen et du Vexin, encore que ces deux derniers peuples fissent partie de la Gaule Belgique, elle-même acharnée contre les Romains). Ceci tend à prouver déjà que toute cette région Bretagne-Normandie était fortement celtisée, et l’archéologie de l’âge du fer confirme ce fait, notamment par la découverte de nombreuses « haches à douille ». Ces objets, qui apparaissent en Europe avec la civilisation dite « de Hallstatt », dont le caractère celte ne fait aucun doute, corroborent la présence d’un fort peuplement celtique en Normandie. [La présence de Ligures ou d’Ibères en Normandie a été formellement réfutée]

Voici 4000 ans, les premiers Celtes arrivent en Gaule. Ils apportent avec eux le bronze. Le bronze est bien celtique et même proto-celtique (et non ligure), dans la mesure où la population qui répandit le bronze en Europe est celle qui prit par la suite le nom de Celtes, après Hallstatt et La Tène, centres d’expansion. Ce qu’on peut affirmer, c’est que depuis le début de l’âge du bronze (1800 av.J.C.) jusqu’à l’expansion des Romains, les peuples métallurgistes du centre de l’ Europe n’ont cessé de recouvrir la Gaule en vagues successives et qu’ils portaient à coup sûr le nom de Celtes au Ve siècle av.J.C.) Hérodote place à juste titre le berceau de la première Celtique dans une aire géographique s’étendant du Danube au Rhin. Alors qui sont-ils ? Et d’où viennent-ils ?

Comme leurs prédécesseurs, ils arrivent d’Europe centrale et d’Allemagne méridionale, de ce grand creuset où s’est formée la première civisation européenne. Ils se nomment les Kymris mais sont des Celtes tout comme les Gaëls qui les ont précédés. Bien que les Kymris selon Strabon, aient été moins blonds que  les Gaëls, leur morphologie s’apparente nettement à celle du type nordique. Ainsi, l’aspect nordique de nombreux Normands, dans lequel on veut souvent voir une origine scandinave, serait dû en réalité à leurs ancêtres Celtes Kymris. L’arrivée des Kymris va provoquer un certain « tassement » des populations précédentes, et probablement des conflits plus ou moins atténués par la fraternité de race et de culture. Au bout du compte, Gaëls et Kymris se mêleront et constitueront la nouvelle population celtique, avec prédominance des Kymris dans le nord-est, le nord et la région maritime comprenant l’actuelle normandie. L’implantation des Kymris s’étendit donc du Rhin à la Manche et à la moyenne Loire et modifia la répartition des tribus celtiques sur l’ensemble du territoire. C’est ainsi que les Romains retrouveront les Séquanes (primitivement peuple de la Seine) dans le Jura. Quant aux tribus qui habitent la Normandie, plutôt Gaëliques dans le Cotentin et Kymriques dans la vallée de la Seine, elles se sentiront toutes parfaitement unies et celtiques à l’arrivée de César qui ne pourra trouver aucun allié en Normandie, contrairement à d’autres parties de la Gaule.

Le Celte est donc une symbiose entre deux grandes races, soit, d’une part, un élément nordique ou plutôt subnordique, et la race alpine qu’il ne faut pas confondre avec la race méditerranéenne, dont elle diffère énormément. Le méditerranéen est un homme léger, souple, gracile ; il a le crâne étroit et allongé (c’est-à-dire qu’il est dolicocéphale). L’Alpin, au contraire, est un homme trapu, robuste, un peu lourd ; il a le crâne large (c’est-à-dire qu’il est brachycéphale). On reconnaîtra aisément le type moyen du paysan français, et particulièrement celui du paysan normand comme du paysan breton. D’une façon générale les Bretons sont plus petits et plus bruns que les Normands. Cela s’expliquerait par une plus grande présence d’Alpins en Bretagne. Mais par la couleur des yeux et la dimension crânienne, on s’aperçoit  que Bretons et Normands sont logés à la même enseigne.

La guerre contre César

César arrive en Gaule en libérateur. (le mot magique !!)

En effet, Les Eduens, en guerre contre les Séquanes, ont appelé les Romains car leurs belligérants ont appelé les Germains Suèves. Mais bientôt, Rome tentera de s’imposer. Sous prétexte d’alliance et d’amitié, les Romains dictent leur conduite aux Celtes. (Cela ma paraît trés actuel !!)

Les Celtes commencent à réagir. Les premiers sont les Belges. Ils lèvent contre Rome une forte armée qui comprendra 10.000 Calètes de Normandie. Toutefois, César a des alliés en Belgique : Les Rèmes et les Trévires (Reims et Trèves). Les Romains sont vainqueurs. Les Armoricains se soulèvent rejoint par les autres tribus normandes et même les Morins et les Ménapes (Boulogne – St-Omer – Dunkerque) ainsi que des renforts venus de Grande-Bretagne. Le signal de la bataille est donné par les Unelles du Cotentin, tandis que les Lexoviens de Lisieux et les Eburovices d’Evreux mettaient à mort leurs sénateurs qui voulaient pactiser avec Rome. César envoya contre la Normandie trois légions commandées par un de ses lieutenants Titurius Sabinus. Elles furent mises à mal et encerclées durant toute la campagne par les Celtes normands que commandait le chef unellien nommé Viridovix.

Mais le grand combat naval qui opposa les Armoricains et les Romains fut perdu par la flotte vénète, et l’armée de Viridovix fut elle-même écrasée à Moncastre, dans les marais de Carentan. (-55)

Viridovix, le Vercingétorix de Normandie

Malgré une nouvelle résistance des Belges, la mainmise romaine continua de s’appesantir sur toute la Gaule jusqu’au grand soulèvement dirigé par Vercingétorix (-52), auquel les tribus bretonnes et normandes participèrent d’un même élan.

C’est un vieux chef normand Camulogène qui commandera les tribus de la Seine et combattra autour de Lutèce le fameux lieutenant de César, Labiénus, à la tête de 4 légions.