AUJOURD’HUI BREXIT, DEMAIN ESPEXIT?

Jordi GARRIGA, correspondant Métainfos en Espagne

Le 23 juin 2016, le référendum de sortie de l’Union européenne s’est tenu au Royaume-Uni, qui a obtenu un OUI inattendu pour cette option. Qu’il s’agisse d’un vote de punition contre le gouvernement ou du résultat d’un euroscepticisme britannique séculaire, ce résultat a contraint à des négociations qui semblent arriver à leur but, alors que la première ministre Theresa May est disposée à appliquer le dit Brexit le 29 mars prochain. Elle n’a pas demandé de prolongation.

En ce qui concerne l’Espagne, il semble que cette nouvelle situation, la sortie du Royaume-Uni de l’UE, va poser des problèmes au gouvernement, dans la mesure où elle concerne quatre domaines principaux.

Le plus évident aux yeux de quiconque est Gibraltar. Cette petite enclave du sud de l’Espagne est qualifiée depuis des années par l’ONU de « territoire non autonome en attente de décolonisation ». Après le récent échec de Theresa May au Parlement britannique, où son plan de sortie de l’UE n’a pu être approuvé”, la Commission européenne a préparé un document de sortie « définitif » dans lequel Gibraltar est qualifié de « colonie » à l’unanimité par les États membres. Déclare en particulier qu’ « il existe un différend entre l’Espagne et le Royaume-Uni concernant la souveraineté de Gibraltar, un territoire pour lequel la solution doit être trouvée à la lumière des résolutions et décisions pertinentes de l’Assemblée générale des Nations Unies » et répète avec insistance que c’est « une colonie de la couronne britannique ». Si une sortie se produit sans accord spécial, la frontiere de la roche sera fermée, sans circulation libre.

Un autre aspect est la situation dans laquelle vont se retrouver environ un million de Britanniques vivant et / ou travaillant en Espagne. Tous ne sont pas des retraités qui profitent de la différence économique entre les deux pays pour profiter d’une retraite en or sur la côte méditerranéenne, puisqu’ils représentent 20% du total. Beaucoup de jeunes et d’adultes seront sérieusement affectés sur leur activité économique, à laquelle s’ajoutent les quelque 700 entreprises britanniques opérant en Espagne, dont l’une est … Iberia. Peut-être que la compagnie aérienne historique espagnole ne pourra plus alors opérer en Espagne. C’est la mondialisation, mes amis !

Au Royaume-Uni, plus de 200 000 Espagnols vivent et travaillent. Inutile de dire que leur situation comme celle des 300 entreprises espagnoles implantées sur le sol britannique subiront également un changement radical.

Et le point le plus important est la relation commerciale entre l’Espagne et le Royaume-Uni. Les Britanniques sont le premier ou le deuxième partenaire économique au sein de l’UE, selon les années. Ils sont notre quatrième client à l’exportation et le sixième duquel, nous importons le plus de produits. Le Royaume-Uni est la principale destination des investissements étrangers espagnols tandis que les Britanniques sont le deuxième investisseur en Espagne. En outre, un quart des touristes qui arrivent en Espagne chaque année sont britanniques. Il se déplace environ 55.000 millions d’euros entre les deux pays. Il est donc facile de penser que le gouvernement espagnol souhaite un accord « progressif » et que les négociations finales devraient être prolongées aussi longtemps que nécessaire. Après la sortie, il est plus que probable que l’Espagne deviendra l’un des pays « contributeurs », au lieu de « bénéficiaires », ce qui, d’une part, nous donnera plus de pouvoir mais, d’autre part, nous entraînera à plus de dépenses. Sommes-nous vraiment prêts pour cela ?

En 2021, nous saurons la vérité et peut-être penserons-nous alors qu’il nous serait préférable de partir sans regarder en arrière …