Michel LHOMME
Depuis deux ans le Pérou est en pleine crise politique et institutionnelle. Pour asseoir une légitimité problématique, Martín Alberto Vizcarra ancien vice-président de la République de 2016 à 2018 et président de la République depuis 2018 après la démission du centriste droitier Pedro Pablo Kuczynski accusé de corruption a organisé ce dimanche un référendum plébiscitaire tout à la fois ridicule et coûteux dans les questions posées car qui osera répondre le contraire (voir l’image de tête). Ce référendum du dimanche 8 décembre a porté sur le retour au bicaméralisme, la limitation du nombre de mandats des élus, le financement des campagnes électorales, et une réforme du conseil judiciaire national, dans un contexte de lutte générale contre la corruption.
Franchement tout ceci se présente comme un grand cirque et cet appel à voter une caricature de démocratie directe, une parodie politicienne. La plupart des Péruviens n’iront d’ailleurs aux urnes que pour éviter les amendes, le vote étant là-bas obligatoire. Ils savent que rien sur le fond ne changera vraiment.
AlbertoFujimori, malade et âgé de quatre-vingt ans, le vainqueur du Sentier Lumineux et qui redressa brillamment certes avec la main un peu dure le pays croupit de nouveau sans reconnaissance en prison après avoir été partiellement amnistié un temps pour raisons de santé. En fait s’étant rapproché des Chinois à la fin des années 90, les Etats-Unis s’efforcèrent de le tuer politiquement le considérant très vite comme un chef d’Etat voyou et utilisant pour se faire leur propagande éhontée sur le respect des Droits de l’Homme alors que Montesinos le bras droit de Fujimori à l’époque était un agent de la CIA aux ordres.
Les Humala ? Ollanta et sa femme belge Nadine, qui gouvernèrent le pays de 2011 à 2016 furent eux-aussi emprisonnés pour corruption et tous leurs biens immobiliers saisis puis de nouveau remis en liberté.
Pedro Pablo Kuczynski (PPK) fut contraint de démissionner cette année et Vizcarra devint président après avoir été auparavant envoyé comme ambassadeur au Canada d’octobre 2017 à mars 2018 après avoir été un temps ministre des Transports. Cet écart soudain du pays avait en réalité des raisons peu saines puisque Vizcarra était alors soupçonné aussi de corruption dans la construction de l’aéroport de Chinchero à Cuzco. Nul doute que ces accusations ressortiront un jour dans un nouveau lynchage médiatique à venir pour l’hiver prochain peut-être.
Keiko Fujimori, principal leader de l’opposition est elle-aussi actuellement en prison comme son père et son mari est même poursuivi par une interdiction de sortir du pays. Enfin, pour compléter ce grand cirque politique de la lutte anti-corruption , le plus corrompu de tous, l’ancien amant de madame Mitterrand, le socialiste apriste Alan Garcia s’était réfugié en novembre à l’Ambassade d’Uruguay pour demander l’asile politique soutenant qu’il était persécuté politiquement alors qu’il est tout simplement lui-aussi compromis comme la majorité de la classe politique dans le cadre de la vaste enquête sur le géant brésilien des travaux publics Odebrecht et la construction du métro de Lima d’ailleurs toujours inachevé et quasi suspendu. Quelques semaines plus tard, l’Uruguay fut salué par les citoyens péruviens pour refuser l’asile politique à Garcia qu’ils expulsèrent d’ailleurs du bâtiment officiel de l’Ambassade. Actuellement Alan Garcia fulmine de colère dans son département de Miraflorès.
Ainsi va donc la politique en République péruvienne tandis que le peuple se serre toujours autant la ceinture, que les Vénézuéliens affluent, fuyant la misère et le chaos et que la presse s’engraisse sur le dos des scandales politiques à répétition qui remplacent pour elle les télé novelas brésiliennes ou colombiennes au détriment de l’unité nationale.